Couronnement de Charles III vu de ma fenêtre

La journée du Couronnement de Charles III m’a vue définitivement sortir de l’enfance et de l’émerveillement pour les rois et les princes !

Londres et Windsor sont liés à mon enfance, en 1958 et 1959, j’y ai passé deux mois d’été, apprenant l’anglais sur place avant de l’apprendre au lycée, comme une langue maternelle qui me permet d’aider maintenant les auteurs francophones à travers le monde à utiliser des outils d’écriture anglais et australien, Scrivener et AeonTimeline.

Si j’ai gardé toute ma vie une tendresse enfantine pour la Reine Elizabeth II, je n’en ai jamais eu pour son rejeton le Prince Charles, de ma génération, à deux ans et demi près.

Si j’aime toujours voir les décors londoniens et le défilé des personnalités, si j’apprécie l’excellente logistique des festivités, si j’aime l’esprit du Commonwealth et la fierté des diversités, si j’aime le peuple, son histoire, sa culture, ses arts, ses monuments, sa musique, beaucoup de choses m’ont choquée.

Choquée que Camilla ne soit plus Reine Consort comme l’avait demandé la Reine Elisabeth peu avant sa mort. Choquée qu’une usurpatrice soit sacrée Reine à part entière. Camilla était pour Charles « sa part de vie non négociable » et la Reine, chef de l’église anglicane, avait dû accepter le mariage de deux divorcés. Certes, Elisabeth II n’avait pas assisté à la cérémonie religieuse : une façon de faire l’autruche. Charles aurait pu alors renoncer à son titre de Prince Héritier, comme son oncle avait abdiqué, pour vivre son amour avec une femme divorcée.

Choquée de voir le fils William faire allégeance à son père comme son grand-père l’avait fait à sa grand-mère, grand-père étant resté Prince Consort toute sa vie. Camilla aurait dû tenir ce rôle au lieu d’être sacrée Reine.

Il y avait une éclipse la veille au soir, lors de la réception des personnalités internationales à Buckingham Palace. Ce n’est pas de bon augure pour le roi Charles III couronné le 6 mai 2023 à midi.

Dès le début des cérémonies, j’ai eu un mauvais pressentiment, comme j’en avais eu lors des intronisations de nos deux derniers présidents de la République française, Hollande et Macron, qui ont fait sombrer la France dans le chaos. Les trombes d’eau qui tombaient sur eux à l’Arc de Triomphe m’avaient fait penser que les cieux et les dieux n’étaient pas avec eux. Surtout pour Macron. La réalité que nous vivons depuis mai 2017 va bien au-delà des pronostics pessimistes que j’avais faits sur son régime, bien au-delà du pire que j’imaginais alors.

De mes apprentissages druidiques, j’ai retenu qu’une cérémonie n’est heureuse que lorsque le soleil rayonne :

« La vérité à la face du monde, sous l’œil du soleil »

Jusqu’à la fin, j’ai espéré un rayon de soleil qui apporterait un peu de lumière et de joie sur la journée pluvieuse et grise.

Hélas, lorsque la famille royale était au balcon de Buckingham, quand les hélicoptères sont arrivés dans le brouillard, je pensais à la scène d’Apocalyse Now, à la guerre qui arrivait, à l’effondrement qui allait déranger ce bel ordonnancement de richesses.

J’avais essayé de m’intéresser au Prince de Galles bon jardinier et bon gestionnaire de ses terres héritées. Cela n’a pas suffi à me le rendre sympathique. Trop d’abondance d’un côté, trop de misère de l’autre !

Si je n’ai pas grande estime pour lui, j’en ai encore moins pour celle qu’il essaie de légitimer à marche forcée en la faisant sacrer reine auprès de lui.

Quand elle a été couronnée, j’ai pensé :

« L’église anglicane vient de consacrer un couple adultérin ! »

Que d’hypocrisies cruelles derrière les dorures, les pierres précieuses, les soiries d’apparat !

Bien sûr, tout au long des cérémonies, j’ai pensé à Diana, la princesse des cœurs, celle que nous n’oublions pas.

Nous enterrions notre plus jeune frère quand le monde entier pleurait Diana. Hier, la pluie qui se déversait sur les troupes, sur les gens, sur les carrosses, était les larmes de Diana.

Comme beaucoup d’Anglais et de sujets britanniques, je peux dire :

#NotMyKing #NotMyQueen ! #NoMonarchy.

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Humble hommage à la Reine Elisabeth II

Hier, 19 septembre 2022, après avoir préparé un chantier de restauration des boiseries de ma chambre, j’ai pris le temps d’assister aux cérémonies des funérailles d’Elisabeth Regina, personnage public qui fait partie de ma vie depuis qu’elle est devenue reine, lorsque petite fille asthmatique, souvent malade, j’écoutais beaucoup la radio. Je me souviens aussi de l’appel de l’abbé Pierre en janvier 1953… Nos jeux de récréation à la rentrée 53 étaient inspirés du Couronnement de la Reine.

Je me suis posée au bureau et j’y ai passé la journée, à me remémorer les moments de mon enfance passés devant ces bâtiments historiques qui n’ont pas changé, toujours entourés de grands arbres.

J’ai des souvenirs des châteaux de Buckinham Palace et de Windsor, mais surtout des parcs, Saint-James Park, Richmond Park, Kew Gardens, Hampton Court. En revoyant les lieux splendides que j’ai eu l’occasion de voir autrefois, j’ai réalisé à quel point j’ai eu la chance d’acquérir très tôt une culture des parcs et jardins, typiquement anglaise. Mes premières références de parcs et de musées viennent de Londres et de ses environs, des années avant de découvrir ceux de Paris et d’autres capitales européennes. Ces primes sensations esthétiques inspirent encore ma maturité dans la gestion de mon domaine de Kerantorec. J’ai conservé les grands arbres de mes ancêtres et je plante de grands arbres pour l’avenir.

Revoir les anciens Premiers ministres britanniques m’a fait réviser l’histoire contemporaine.
Revoir les lieux de mon enfance m’a fait revoir ma propre vie depuis les années 50.

Lors de l’entrée du cercueil dans l’abbaye de Westminster, j’ai été bouleversée par la couronne des fleurs des jardins de la Reine.
Elle m’a rappelé l’enterrement de Bruno, mon jeune frère paysagiste-horticulteur, parti trop tôt avant ses 40 ans, que nous pleurions 25 ans avant, comme le monde pleurait la Princesse Diana.
J’avais écrit sur le faire-part d’Ouest-France et du Télégramme :
« Il était un homme de la terre.
Il retourne à la terre.
Apportez-lui des fleurs de vos jardins. »
J’ai le souvenir d’un cimetière rempli de gens faisant la queue, les bras chargés de fleurs, serrés les uns contre les autres, pour atténuer la douleur.
Et quand je repense à ces moments d’immense tristesse que ces funérailles royales m’aident à passer, je revois les fleurs et les feuillages de nos jardins en cette fin d’été à la lumière glorieuse.
Requiescat in pace

Ma sœur (82 ans) est arrivée à la fin de la cérémonie à la chapelle Saint-Georges de Windsor et nous avons évoqué nos souvenirs de ces lieux grandioses, elle dès l’été 1956 (elle avait eu le privilège d’assister à l’accueil par la Reine du Prince Fayçal d’Arabie), moi dès l’été 58 quand les placards des journaux dans les rues affichaient : « The Queen is Expecting a Baby » (c’était Andrew). A la gare Victoria, j’avais vu partir plus tard des soldats à Chypre. J’ai ainsi pris conscience très tôt des conflits mondiaux.

Les cérémonies officielles ont la puissance de nous faire prendre conscience de nous-même à travers des images idéalisées en dehors de notre quotidien. J’ai puisé hier une grande force en suivant l’ensemble des cérémonies sur les chaînes anglaises sans commentaire, juste le son lancinant des bottes sur le sol, les marches funèbres aux thèmes aussi répétitifs que du Philip Glass, le glas de Big Ben, la lamentation des bagpipes, dans la beauté des images et la grandeur de la logistique. Mon côté pratique apprécie toujours les bonnes organisations.

Chaque année, je cueillais ma première rose Queen Elisabeth au moment de l’anniversaire de sa royauté, le 2 juin et je regardais les cérémonies de Tropping The Colours, adorant voir la Reine à cheval, tant que cela lui a été possible. Le 6 juin 2022, j’ai eu l’honneur d’être invitée par une voisine écossaise à une garden-party avec ses amis britanniques pour fêter le Jubilee de la Reine et c’était bon de participer à la ferveur d’un peuple autour de sa souveraine.

Chaque année, je regardais la cérémonie du Te Deum du Commonwealth et m’émerveillais de la diversité des peuples du monde. Hier encore, j’admirais la place des femmes dans la sphère politique, dans les compagnies des armées, dans la hiérarchie religieuse, de cette royauté bien plus égalitaire que notre régime républicain de plus en plus poussif.

Chaque Noël, j’écoutais le message de la Reine.

Chaque ouverture du Parlement, j’écoutais son discours.

Sa Majesté rythmait mon année comme l’aurait fait un membre de ma famille ou une amie très chère, puisque mon amie Nicole Courset de Lorient, sujet britannique, avec qui je partageais l’amour des jardins, des tableaux et de la vie cosy, était née à Chelsea, quartier de Londres, le 30 décembre 1925, quelques semaines avant la Reine.

J’ai apprécié l’extrême élégance de la famille royale.
L’élégance est devenue une valeur rare en France.

C’était une journée exceptionnelle.
Ma fille Ana ce matin m’annonce que l’article sur son entreprise Jungle Cookies est sorti hier.

J’ai partagé ainsi l’article sur Facebook :
Un bel article sur ma fille Ana Le Doze, qui a créé son laboratoire de pâtisserie Jungle Cookies à Lorient en formule à la commande via Facebook & Instagram pour commencer.
L’article est sorti dans un numéro de journal historique :
Adieu à la Reine
Bienvenue à Jungle Cookies !

Gaelle Kermen, Kerantorec, le 20 septembre 2022
Crédit photo : Portrait de Bruno le Doze par Coralie Portet-Le Doze, 1997